L’enquête « Génération quoi ? » rendue publique cette semaine par le Monde, est riche de nombreux enseignements. Alors que certains la décrivent volontiers dépressive et révoltée, la jeunesse de France (18-34 ans) est simplement réaliste. Plus cabossée peut-être que ses aînés, elle est sans doute plus mûre, certainement moins infantilisée. Et elle exprime avec force des exigences qui interpellent.

Il y a tout d’abord le constat unanime que le système éducatif à la française est un échec. Trop souvent, il réfrène les talents, noie les individus dans la masse et dynamite la confiance et l’ambition. Nous savions qu’en dépit de professeurs talentueux, hélas mal exploités, notre système était idéologisé, déconnecté du réel. Il est aujourd’hui décrié par ses premiers usagers.

Autre élément, la défiance vis-à-vis des institutions. Incantatoires et inaccessibles, les partis politiques, institutions religieuses, entreprises et autres corps intermédiaires ont progressivement perdu leur crédibilité. La jeunesse sait décrypter les faux-semblants, les jeux de rôles, les postures, les salauds sartriens et les soupes tièdes. Elle exige une communication de proximité et de conviction. Elle ne veut plus de comédiens qui la fassent rêver mais des leaders qui lui disent la vérité, même difficile, et se mettent au travail, avec elle. Plus que jamais, la valeur travail est plébiscitée. Tout comme la valeur famille, refuge en période de tempête, socle fondamental lorsque le jeu s’accélère. N’en déplaise à Monsieur Peillon, les parents sont attendus comme premiers éducateurs de leurs enfants, pourvoyeurs de confiance, de solidarité et, osons le dire, d’amour.

Rétifs aux partis politiques, nos jeunes s’intéressent pourtant à la politique, au sens noble et large du terme. Ils sont prêts à défendre l’intérêt général et aspirent à s’engager auprès des plus démunis. Près de 80 % seraient favorables à un service civique obligatoire, une initiative promue par Sens Commun  dans son rapport sur l’engagement. 

Cette étude vient corroborer les messages émis par les nombreux relais dont nous disposons sur l’ensemble du territoire. Éducateurs, formateurs, recruteurs, militants associatifs, tous confirment que la jeunesse de France n’est plus dupe. La bienpensance n’a plus prise sur elle, les fantasmes et obsessions libertaires projetés sur elle par leurs aînés soixante-huitards ne prennent pas. Happée par la vitesse et l’incertitude de notre modernité, elle déplore, pour reprendre les mots de Gustave Thibon, qu’« à force d’être proche de ce qui est loin, elle est devenue loin de ce qui est proche ».

La jeunesse, dont nous faisons partie, n’est pas fanée. Elle n’est pas fataliste. Elle a juste soif : d’identité, d’authenticité, de concret. Le sens commun sera de les lui apporter.