Interview d’Élie Rabillard – Touche pas à ma statue : “il y a une montée inquiétante de la haine envers les symboles du patrimoine français”

Qu’est-ce qui a motivé la création de l’association Touche pas à ma statue ?

Nous avons créé l’association pour défendre des statues menacées de destruction ou de déplacement, à commencer par celle de Saint-Michel aux Sables-d’Olonne, située non loin de chez nous. Face à une attaque contre ce patrimoine, nous avons voulu soutenir la population locale, dont 95 % souhaitaient la conserver, et aussi le maire qui se trouvait seul contre des associations qui voulaient la déboulonner. Cette première mobilisation nous a poussés à continuer à défendre d’autres statues menacées, afin que notre patrimoine ne disparaisse pas dans l’oubli.

« 95 % des habitants souhaitaient conserver la statue de Saint-Michel »

Élie Rabillard

Quelles statues avez-vous à cœur de défendre ?

Nous défendons deux types de statues : celles qui sont vandalisées, pour lesquelles nous faisons un travail d’alerte et d’information sur les réseaux sociaux. Ainsi que celles qui risquent le déboulonnage, où nous nous mobilisons dans des actions à plus long terme pour les protéger. Notre but est simple : protéger les statues qui font partie de notre histoire et de notre culture et dénoncer ces actes avant qu’ils ne deviennent une habitude.

Recevez-vous beaucoup de signalements de statues en danger ?

Nous recevons régulièrement des signalements, principalement via nos réseaux sociaux, où notre communauté est très active. Environ une fois par mois, nous sommes informés d’un cas de statue vandalisée ou démolie. Une partie importante de notre recensement se fait aussi en surveillant la presse locale.

Qu’est-ce qui motive ceux qui saccagent les statues et quel impact cela a-t-il sur la société française ?

Il y a une montée inquiétante de la haine envers les symboles du patrimoine français. Surtout dans des régions rurales où des statues sont attaquées, comme le monument aux morts dans la Creuse, ou bien une statue décapitée en Savoie, ou encore une statue criblée de balles dans le Gard. Cela reflète une crise plus large, alimentée par un rejet de la France traditionnelle et de ses valeurs. Ces attaques ne se limitent pas aux statues : nous voyons également des actes de vandalisme contre des églises ou bien des chefs-d’œuvre dans les musées. Aussi, nous constatons que de plus en plus de discours publics sont très critiques envers notre patrimoine.

« Environ une fois par mois, nous sommes informés d’un cas de statue vandalisée ou démolie. »

Élie Rabillard

Comment votre association collabore-t-elle avec les collectivités locales ou les institutions patrimoniales pour préserver ces œuvres ?

À chaque mobilisation, nous alertons les autorités locales et cherchons leur soutien. Nous contactons les maires concernés et leur proposons une aide juridique lorsque leurs statues sont menacées. Nous leur expliquons les démarches à suivre face aux associations qui veulent déboulonner leurs statues et les guidons vers les ressources nécessaires. Nous aimerions davantage nous implanter dans le tissu local pour soutenir plus efficacement les maires, souvent démunis face à des organisations plus expérimentées.

Quelles sont les principales batailles que vous avez menées ou que vous menez actuellement ?

Notre association a été largement médiatisée lors de la bataille pour sauver la statue de Saint-Michel aux Sables-d’Olonne, menacée par la loi de 1905 sur la laïcité. Nous avons aussi fait connaître le cas de la statue de la Vierge Marie à La Flotte-en-Ré, accidentellement détruite puis menacée de ne pas être reconstruite à cause de militants laïcs. Dans les deux cas, nous avons aidé les mairies à déplacer ces statues sur des terrains privés pour les sauver. Nous avons aussi soutenu une association au Mans dans la sauvegarde de la chapelle Saint-Joseph, menacée par un projet d’agrandissement.

Comment percevez-vous le rôle de l’État dans la protection de ce patrimoine ? Pensez-vous qu’il en fait assez ?

L’État français s’intéresse à la protection du patrimoine, mais lorsqu’il s’agit de statues ou de monuments ayant une dimension religieuse, il est souvent bloqué par la loi de 1905 sur la laïcité.

Nous estimons que de nombreuses statues érigées après la Première ou la Seconde Guerre mondiale, souvent en hommage aux morts, devraient être préservées en tant que patrimoine historique et militaire. Et non considérées comme des symboles religieux à supprimer. Nous espérons que l’État prendra en compte cette distinction pour les protéger.

Quels projets prévoyez-vous de lancer cette année pour sensibiliser davantage le public à la protection du patrimoine français ?

Pour notre rentrée, nous allons nous mobiliser pour défendre le projet de statue du général Bigeard, un héros militaire français, actuellement combattu par quelques militants d’extrême gauche ou algériens. Nous avons également pour objectif de mieux documenter sur notre site les attaques contre les statues, pour suivre leur évolution et mieux comprendre l’ampleur des dégâts.

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