droits-des-enfantsLaisseriez-vous votre enfant de 12 ans aller voir une orgie sexuelle au cinéma ? Non, très vraisemblablement. Et pourtant, le CSA estime ce genre de spectacle approprié à ce type de public : alors  qu’aux Etats-Unis, le dessin animé pour adultes Sausage Party était interdit aux moins de 17 ans non accompagnés par un adulte, le seuil minimal fixé par la Commission de Classification des Films en France est de… 12 ans.

De façon plus générale, se cache derrière cette actualité la question de la pornographie aux effets dévastateurs sur nos jeunes et sur les relations garçons-filles, à court et long termes.

Aujourd’hui, 22% des mineurs fréquentant les sites pornographiques ont moins de 10 ans[1] et 55% des jeunes de moins de 16 ans ont déjà vu un film pornographique[2]. En 2015, une étude stipulait que 30% des adolescents de 13 ans en visionnent[3].

Ces images violentes, où l’homme domine voire viole la femme, réduite à l’état dégradant d’objet sexuel, constituent souvent la première source d’information et de représentation des mineurs sur la sexualité. Dans ces films, des dérives sexuelles sont présentées comme « banales » et comme sources de plaisir, favorisant ainsi la normalisation d’actes pourtant profondément déshumanisants pour ceux qui s’y adonnent.

Dans un rapport commandé en mars 2002 par Ségolène Royal, alors Ministre déléguée à la famille, aux enfants et aux personnes handicapées, le Collectif Inter associatif Enfance-Médias alertait déjà les autorités publiques : « Cette confrontation est un véritable choc et la vision de la sexualité de ces enfants risque d’être pervertie à terme – violence liée au sexe, image dégradée de la femme, logique de performance, incitation au viol voire zoophilie et inceste. »

Le phénomène s’est depuis accentué, à travers notamment l’usage des smartphones, où les mineurs peuvent accéder à l’univers pornographique par un simple clic sur internet, notamment à cause des “tubes”  comme YouPorn ou PornTube, qui échappent à toute régulation parentale.

Lorsque l’on sait ce qu’une sexualité déconnectée de toute responsabilité peut avoir de conséquences sur le développement individuel de l’adolescent et a fortiori, sur sa future vie d’adulte, nous sommes en droit de nous demander pourquoi ce sujet n’est pas une des priorités gouvernementales. Rappelons qu’en 2009, les viols représentaient les 3/4 des crimes commis en France par les mineurs (Figaro 12/6/2009) tandis que la protection judiciaire annonçait une augmentation de 50% en 10 ans des affaires d’agressions sexuelles ou viols chez les moins de 18 ans.

 Il existe pourtant des solutions et des moyens pouvant être mis en œuvre rapidement pour endiguer cette course en avant vers le consumérisme sexuel et la dégradation des relations homme-femme.

Il devient urgent d’obliger les fournisseurs Internet à  bloquer l’accès aux sites qui proposent des diffusions sans contrôle et pénalement répréhensibles. Les “tubes” échappent entièrement à la loi n°2011-267, qui prévoyait l’interdiction de contenu pornographique à destination des mineurs. Il est nécessaire d’imposer à ces sites un contrôle strict de la majorité, comme cela existe déjà pour les sites de jeux d’argent.

 Enfin, à Sens Commun, nous pensons qu’il est nécessaire de ne pas dissocier éducation sexuelle et éducation affective. La loi de 2003 relative à l’éducation sexuelle à l’école, au collège et au lycée, n’aborde la sexualité que du point de vue physiologique et technique, ce qui est insuffisant. On ne peut pas réduire la reproduction à une simple fonction biologique ni la sexualité à un simple acte mécanique. Certains établissements moteurs ont déjà mis en place une éducation affective de qualité, dont les bénéfices ne pourront s’étendre à tous sans une réelle volonté politique. Et cette réflexion autour de ce qu’on transmet à nos enfants doit se faire avec les premiers éducateurs : les parents.

Pour aller plus loin : Une jeunesse sexuellement libérée(ou presque), Thérèse Hargot (2016).

 
[1] Etude Bit Fender pour Le Parisien, 07/10/2016
[2] IFOP, 17/10/2013
[3] Le Figaro, 15/05/2015