Bruno Le Maire s’en explique avec Sébastien Pilard, président de Sens commun, le mouvement créé dans la foulée de la Manif pour tous.

Conserverez-vous la loi sur le Mariage pour tous si vous êtes élu en 2017 ?

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Au café Bonaparte, Paris (VIe arr.), Sébastien Pilard avec Bruno Le Maire. Sens Commun lance les états généraux de la droite et du centre, ce samedi 20 juin.

Bruno Le Maire – C’est mentir que de laisser entendre que nous reviendrons sur le mariage homosexuel. En politique, trop de belles paroles et de promesses n’ont jamais été tenues par le passé. Dire « abrogation de la loi Taubira », c’est à coup sûr ne pas tenir cet engagement. Et tromper les Français. Pour moi, la primaire servira à dire comment chacun voit l’avenir de notre société. Il faut avoir le courage de ses convictions.

Sébastien Pilard – Je ne suis pas d’accord. Quelle est la cause du manque de crédit de la classe politique vis-à-vis des Français ? La constance, la crédibilité et la cohérence. Bruno s’est abstenu, mais 95 % des sénateurs et parlementaires UMP ont voté contre la loi. Quel message enverrait-on aux Français si au moment où la droite revient au pouvoir, on dit que le sujet n’a plus lieu d’être ? Je pense ensuite qu’il y a consensus aux Républicains contre la PMA et contre la GPA. Or on voit très bien que la loi Taubira ouvre mécaniquement, à travers des décisions de justice, à la PMA et la GPA. Si on veut être cohérent, trouver les moyens nécessaires d’avoir un vrai verrou contre la PMA et la GPA, on est dans l’obligation de revenir sur cette loi. Enfin, il ne faut pas oublier que le vrai point de blocage pour la grande majorité des Français qui ont manifesté contre la loi Taubira, c’est la question de la filiation et de l’adoption. Lorsque nous reviendrons aux responsabilités, nous devons revenir totalement sur cette loi.

Bruno Le Maire – Certes, je vous rejoins sur la nécessité de la crédibilité de la parole politique. Mais je préfère le dire : vouloir réécrire cette loi nous entraînera dans des débats sans fin qui rouvriront des divisions de la société française. Ce n’est pas souhaitable. Pour moi, l’amour homosexuel vaut l’amour hétérosexuel. Et je m’en réfère aux propos du pape : « Qui suis-je pour juger ? » En revanche, je m’engagerai avec détermination contre la GPA, en employant toutes les voies juridiques nécessaires pour l’interdire. Car je crois à la dignité de la personne humaine et je suis totalement opposé à la marchandisation des corps. Ce n’est pas à la justice de dire ce qui est ou n’est pas acceptable dans une société. C’est à la loi.

Sébastien Pilard – Je ne peux que cautionner ce que vient de dire Bruno sur la GPA. Mais qu’en est-il de la PMA et de l’adoption ? De mémoire, la plupart des députés qui se sont abstenus l’ont fait car ils étaient en désaccord avec l’adoption. Aujourd’hui, le message envoyé serait que seule la GPA pose problème. Mais des millions de personnes sont sorties dans la rue pour manifester contre la loi Taubira, ils attendent de la constance et de la cohérence sur ces sujets majeurs.

Bruno Le Maire – Comme responsable politique, je veux rompre avec toutes les vieilles pratiques. Je pèse chacun de mes mots, chacune de mes propositions est réfléchie car, si nous retrouvons la confiance des Français et la crédibilité, nous devrons les tenir. Ma position est donc claire : pas de réécriture de la loi, un combat contre la GPA et un combat pour les familles. Alors que le gouvernement a imposé la double peine en conjuguant la baisse du quotient familial et la mise sous conditions de ressources des allocations familiales. Ce combat-là, aussi, il devra être livré.

PROPOS RECUEILLIS PAR MARION MOURGUE (AVEC JEANNE DUCOS) – Source: LE FIGARO MAGAZINE – 19 JUIN 2015